C’est avec une phrase, courte mais magique, « Il était une fois », que les contes de fée et les légendes populaires s’introduisaient dans les foyers et agrémentaient les veillées familiales. Nos grands-mères étaient sages et cette phrase avait une vertu pédagogique sans pareil pour émerveiller et transmettre.Faisons là donc vivre aujourd’hui pour célébrer, en cette année 2015, l’œuvre d’un Roi et d’un Peuple : la Marche Verte.
Il était une fois 1975 ; il était une fois le retour au giron national d’une terre marocaine ancestrale que les visées expansionnistes et les velléités coloniales avaient soustraite à la mère-patrie
Célébrer 1975, et remémorer sa genèse et le génie qui l’a conçue, est un devoir citoyen et national. Et si cette célébration doit se faire en 2015 dans l’allégresse et la reconnaissance de ceux qui ont rendu possible cette œuvre commune, elle doit surtout prendre une ampleur pédagogique et éducative. C’est le moment de faire preuve d’initiative et d’intelligence pour rappeler (documents sonores, travaux universitaires, recueils, expositions, Colloques etc.), aux jeunes générations ce que leurs parents ont consenti comme efforts et accompli comme devoir pour que leur pays trouve la plénitude de sa souveraineté.
1975, c’est un point de repère marquant de l’histoire du Maroc contemporain. Après le « choc » de 1953 (exil du Roi Mohamed V) et 1956 (L’indépendance), elle vient réaffirmer cette singularité marocaine qui trouve dans la « Révolution du Peuple et du Roi » toute sa magnificence. La rétrocession de Tarfaya (1958) et le retour de Sidi Ifni (1969) au Maroc, sont les enfants légitimes de cette « Révolution » et de cette fusion (Monarchie-Peuple) qui trouvent dans la Marche Verte une manifestation grandiose.
Il était une fois 1975, ce moment particulier où le génie d’un Roi clairvoyant et la volonté d’un peuple patriote et loyal s’unissent pour accomplir ce qui semblait inatteignable : chasser le colonialisme espagnol de la terre marocaine. Mais, 350 000 patriotes marocains, volontaires, de tous âges, hommes et femmes, gens du peuple, l’ont fait le 6 novembre 1975. Ils ont accompli l’impossible avec pour seules armes la foi (le Coran), un volontarisme d’exception et le drapeau national flottant fièrement à la cadence d’une avancée résolue et aux rythmes de chants emplissant les airs sahariens de joie, minimisant les distances et les défaillances physiques…
C’était donc écrit. Le Maroc devait libérer sa terre, retrouver son Sahara et avec lui les racines historiques et naturelles qui l’amarrent à la terre africaine. Mais personne ne pouvait imaginer une telle idée (Une marche pacifique) et une telle force humaine (350 000 âmes) comme moyen de libération d’une terre colonisée depuis 1884 par une puissance coloniale, l’Espagne.
Un dictateur (Staline) se moquant du Pape, se demandait combien le souverain pontife avait de divisions. Le général Franco ne pouvait se permettre une telle moquerie. Il ne pouvait ignorer que le Souverain Chérifien, Feu Hassan II, avait derrière lui tout un peuple et que ce peuple était déterminé et qu’il était intraitable lorsque la souveraineté du pays et l’intégrité physique de son Souverain (Mohamed V, 1953) étaient menacées.
Le juge international lui-même ne pouvait passer outre cette réalité marocaine. Dans l’avis, qu’elle a rendu le 16 octobre 1975 à la demande du Souverain, la Cour Internationale de Justice de la Haye (CJI), est allée plus loin que la simple décision juridique, en plaçant au cœur de l’équation un élément confirmé par l’histoire et les traditions ancestrales marocaines : l’existence de liens d’allégeance (Bay’a) entre les Souverains Chérifiens et les habitants de ces territoires sahariens, spoliés et occupés par l’Espagne depuis 1884.
L’acte de la « ba’ya », ne pouvait (et ne peut) donc se lire et s’interpréter à l’aune d’une simple « cérémonie traditionnelle au cours de laquelle le Souverain Chérifien reçoit l'hommage des dignitaires ». Cet acte est un élément constitutif de l’identité marocaine et fait partie de l’histoire millénaire du pays. Il le relie aux premiers temps de l’islam et rappelle les deux serments faits au Prophète (sws) en l’An 11 (celui d’al ‘Aqaba plus connu sous le nom de l’« allégeance des femmes », cité dans sourate al-Mùmtahana, v.12), et en l'An 13 (impliquant soixante-dix médinois).
La commémoration du quarantième anniversaire de la Marche Verte (1975-2015) ne peut se limiter à l’évocation d’un souvenir.
1975 c’est une leçon de courage et d’abnégation. Sa commémoration ne peut-être qu’une incitation à l’effort et à la cohésion nationale.
1975, comme 1953 et 1956, est l’union parfaite de deux volontés plus fortes que les contingences et les aléas de la diplomatie, de la géopolitique et de la stratégie. Son souvenir doit conforter le peuple marocain dans l’union avec l’intime conviction qu’un Maroc stable, solidaire et vigilant est capable de relever tous les défis ; ceux de la justice sociale, de l’égalité, de la parité et du développement économique et humain.
Il serait long de décliner tous les atouts dont dispose aujourd’hui le Maroc, pour faire face à ces défis. Il serait fastidieux d’égrener toutes les avancées et les réalisations sociétales, structurantes et prometteuses accomplies ces quinze dernières années. La stabilité est une réalité, la communion, la proximité et la complicité entre le Souverain Chérifien, Mohammed VI, et le Peuple marocain sont plus que jamais vivantes et solides.
La commémoration de 1975 doit-être cette occasion particulière, offerte à tous (société civile, partis, école, médias, université, écrivain), pour rendre compte de cette réalité, pour transmettre et rappeler les vertus de la Marche Verte et pour expliquer ce que le Maroc a accompli depuis 1975.
Ce quarantième anniversaire de la Marche Verte, doit rappeler à tous, amis et ennemis, ces mots de Feu Hassan II, à l’adresse de son fils SM Mohammed V :
“(…) Je te recommande ton pays bien aimé, ta patrie le Maroc (…). Sauvegarde son indépendance, défends son unité historique et territoriale. Ne tolère pas qu’il soit porté atteinte d’un pouce à sa liberté et à son intégrité. Prends garde d’accepter aucun marchandage quant à sa sécurité et celle de ses habitants. A l’heure du danger, et quand l’ennemi menacera ton pays, sois à la tête de ses défenseurs (…)”.
Que ces mots soient un testament national, commun à tous les marocains, du Nord ou du Sud, de l’intérieur ou de l’extérieur du pays. Que ces mots résonnent dans tous les coins et recoins du pays pour sensibiliser et mobiliser toutes les forces de la Nation afin de préserver le Maroc contre les adversaires et les envieux de l’Est ou d’ailleurs. C’est ainsi que ce pays de lumière et de contraste, qui assume son histoire
et prépare sereinement son avenir, puisse avancer sur le chemin de l’accomplissement de son destin et la réalisation de ses ambitions.
Paris le 04 novembre 2015
MRAIZIKA Mohammed
(Docteur en Sciences Sociales, Consultant en Ingénierie Culturelle…)